Science et rationalisme

Il y a un rapport étroit entre le rationalisme et la science moderne: le tort de celle-ci n’est pas de s’occuper du seul fini, mais de vouloir réduire l’Infini au fini, et par conséquent, de ne tenir aucun compte de la Révélation, ce qui est proprement inhumain ; or ce que nous reprochons à la science moderne, c’est d’être inhumaine – ou infra humaine, si l’on préfère – et non d’ignorer les faits qu’elle étudie, bien qu’elle en ignore de parti pris certaines modalités. On croit pouvoir s’approcher de la connaissance totale du monde, lequel est pourtant indéfini, par une série forcément finie de découvertes, comme s’il était possible d’épuiser l’inépuisable ; et que dire de la prétention de « découvrir » les causes ultimes de l’existence, et de l’indigence intellectuelle de ceux qui entendent soumettre leur philosophie aux résultats des recherches scientifiques ? Une science du fini ne peut pas survenir légitimement en dehors d’une tradition spirituelle, car l’intelligence est avant ses objets, et Dieu est avant l’homme ; une expérience faite en dehors du lien spirituel qui caractérise l’homme n’a plus rien d’humain, elle est donc contraire, en dernière analyse, à nos intérêts autant qu’à notre nature ; et « c’est à leurs fruits que vous les reconnaîtrez ». Une science du fini a besoin d’une sagesse qui la dépasse et qui la réglemente, comme le corps a besoin d’une âme qui l’anime, et comme la raison a besoin d’un intellect qui l’illumine. Le « miracle grec », avec sa prétendue « libération de l’esprit humain », n’est rien d’autre, en réalité, que le début d’un savoir purement extérieur, et retranché de la véritable Sophia. Les stations de la sagesse p. 45.

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