Einstein

(1) On nous dit qu'un Einstein a bouleversé la vision du monde comme Galilée ou Newton l'avaient fait avant lui, et que les conceptions usuelles qu'il a renversées - celles de l'espace, de temps, de la lumière et de la matière - sont aussi « naïves que celles du Moyen-Âge »; mais, alors, rien ne nous garantit que la théorie de la relativité ne sera pas jugée « naïve » à son tour, en sorte que, dans la science profane, on ne sort de toutes façons pas du cercle vicieux de la « naïveté ».

Du reste, qu'y-a-t-il de plus naïf que de chercher à enfermer l'univers dans quelques formules mathématiques, et de s'étonner qu'il reste toujours un élément insaisissable et apparemment « irrationnel » qui s'oppose à toute « mise au pas »? On nous dira sans doute que tous les savants ne sont pas des athées, mais là n'est pas la question, puisque l'athéisme réside dans la science même, dans ses postulats et dans ses méthodes.

Les théories einsteiniennes sur la masse, l'espace, le temps, sont propres à démontrer les fissures de l'univers physique, mais seul le métaphysicien peut en tirer parti ; la science fournit inconsciemment des clefs, mais elle est incapable de s'en servir, car on ne remplace pas l'intellectualité par quelque chose qui se trouve en dehors d'elle. La théorie de la relativité « illustre » forcément certains aspects de la métaphysique, mais n'ouvre par elle-même aucune perspective supérieure ; une certaine façon de relativiser abusivement la géométrie euclidienne le prouve.

D'une part il y a empiètement du point de vue philosophique sur la science, et d'autre part, empiètement du point de vue scientifique sur la métaphysique. Quant au postulat einsteinnien d'un absolu transmathématique, cet absolu n'est point supraconscient, il n'est donc pas plus que nous et ne saurait être la cause de notre intelligence ; le « Dieu » d'Einstein reste aveugle comme son cosmos relativisé reste physique : autant dire qu'il n'est rien.

La science moderne ne saurait rien nous dire - non par accident mais par principe - sur le miracle de la conscience et tout ce qui s'y rattache, à partir des parcelles infimes de conscience que comporte la vie végétale jusque dans l'Intellect pur et transpersonnel. Les stations de la sagesse p. 45-46.

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